Atelier Taipei

 

CHAPITRE I : UNE BIEN TRISTE NOUVELLE

Lundi 14 janvier, 7H00 du matin.

Je me réveille en sursaut au son du radioréveil. Il faut aller au collège ! Debout Lucas !

Oui, je me présente, je m’appelle Lucas, j’ai 12 ans et je suis en classe de cinquième à l’école française de Taipei. J’ai les cheveux roux coupés courts, les yeux verts et mes joues sont recouvertes de tâches de rousseur (je les déteste).

- Lucas ! C’est l’heure ! Viens vite prendre ton petit déjeuner ! Tu vas être en retard pour le bus !

Vous avez bien sûr deviné qui m’appelle: c’est ma mère ou Kathrine ou encore Katie pour les amis. Je l’adore mais je n’aime pas qu’on me bouscule trop le matin .

- Oui oui, j’arrive maman, cinq minutes et j’arrive !

Je m’habille en vitesse (T-shirt bleu clair, short rouge et basket, ma tenue préférée) et je descends 4 à 4 les escaliers qui mènent à la cuisine. Mon fidèle compagnon (mon chien Rex, un labrador tout blanc) m’accueille en me sautant au cou !

- Arrête Rex, je n’ai pas le temps de jouer !

- Ah ! Enfin ! Tu es là ! Tu t’es réveillé tard ce matin ! Dépêche toi de manger ! Je t’ai préparé tes céréales !

- Merci m’man ! Toi par contre tu es bien matinale aujourd’hui !

- Oui, je crois que j’ai enfin trouvé un endroit sympa pour ma nouvelle exposition de peintures, et je dois prendre des rendez-vous avec certaines personnes.

- Chouette, tu dois être contente alors, depuis le temps que tu cherches. Et papa, tu sais quand est-ce qu’il revient ?

- Oui, certainement la semaine prochaine, son reportage en Afrique prends plus de temps que prévu et le patron du journal lui a demandé de rester une semaine de plus.

- J’espère qu’il pensera à me ramener un nouveau gri-gri !

- Mais oui mon chéri, il te l’a promis, allez mange donc, le bus ne va pas tarder.

- J’ai encore le temps, il est toujours en retard ce bus!

- Bon moi je file, à ce soir. N’oublie pas de sortir les poubelles et si tu as le temps emmène Rex faire un tour au parc, ça fait longtemps… D’accord ? Je rentrerai vers 18 heures !

- Ouais, ouais. Salut m’man à ce soir.

J’avale rapidement mon bol de céréales et je remonte chercher mon sac dans ma chambre quand j’entends le klaxon du bus. Pour une fois, il n’est pas en retard aujourd’hui.

7H30
Je monte dans le bus et comme tous les jours Willy le chauffeur m’accueille d’un sympathique “dzao “ qui signifie salut en mandarin. Je lui rends son bonjour et je vois une place libre au fond du bus à côté de Jean-Marc, un élève de 4ème, qui écoute de la musique.

En passant dans l’allée, avec mon sac je bouscule sans faire exprès Robert, un élève de 3ème qui fait parti de la bande des rappeurs .

Alors, il se retourne, me tape dans le dos et m’attrape le sac:

- Eh ! Fais gaffe Poil de carotte, tu m’cherches ou quoi !

- Mais non, je n’ai pas fait exprès, c’est le bus qui a freiné !

- Ouais, c’est ça … le bus, tu m’as fait mal et je t’attends à la sortie !

- Allez lâche-moi, ou j’appelle la dame du bus !

- Je t’attends à la sortie du bus, j’te dis, avec mes copains, prépare-toi…

Il saisit encore plus fort mon sac et me tire en arrière pour essayer de me faire tomber mais la dame intervient et me demande d’aller m’asseoir rapidement. Finalement, Robert me lâche et je prends place à côté de Jean-Marc qui me sourit .

Car tout le monde les déteste ceux-là: parce qu’ils sont les plus grands, ils s’amusent toujours à embêter les plus jeunes, à faire du chantage, demander de l’argent ou à faire mal aux autres. Et avec moi, ils se moquent sans arrêt de mes tâches de rousseur et j’ai horreur de cela.

Ils sont trois : Didier (le gros) qui aime se faire appelé Zoup, Fabrice (le petit) dit Zip et Robert (le plus mince ) dit Zap. Ils s’habillent presque toujours pareil: pantalon large et troué, long T-shirt, casquette à l’envers et ils portent souvent des lunettes de soleil.

Nous, on les appelle plutôt la bande des frimeurs et notre prof de sport les surnomme les rappeurs de gruyère; ça nous fait bien rire.

D’ailleurs, cela me fait penser qu’aujourd’hui c’est lundi, mon jour préféré, car on commence par une heure de sport.

7H50

Nous arrivons enfin à Yangmingshan, la montagne sur laquelle est construite notre nouvelle école et le bus nous laisse devant les portes du Campus. Je descends du bus et Vincent, mon meilleur ami, m’appelle:

- Lucas, viens vite, j’ai quelque chose à te montrer !

- Oui, j’arrive !

J’y vais en courant, mais la bande des rappeurs….m’arrête et m’encercle.

- Eh, p’tite carotte! T’oublie pas quelque chose ?

- Euh…non, quoi ?

- Comme tu m’as bousculé dans le bus, tu m’dois 40 NT !

- Mais vous êtes dingues, jamais de la vie!

- Répète un peu ce que t’as dit!

- Vous êtes…

Au même instant le surveillant tape dans ses mains: il faut aller se ranger. Ouf, j’ai eu chaud cette fois !

Je rejoins Vincent et il me montre la dernière Play-Station qu’il a achetée ce week-end.

- Qu’est ce qu’ils te veulent ceux-là encore ?

- Oh ! Comme d’habitude, il faut qu’ils ennuient quelqu’un, t’inquiète pas, c’est rien !

- S’il t’ennuie trop, tu me le dis Lucas et je vais leur parler.

- Oui, merci Vincent, mais ça va !

Car la bande des rappeurs ne taquine jamais Vincent. C’est normal, c’est lui le plus grand de l’école alors ils n’osent pas l’embêter !

8H00
Nous nous dirigeons vers les vestiaires du gymnase pour nous changer pour le cours de sport. Le professeur, Monsieur Jean Deville arrive avec un filet de ballons de football:

- Chouette, on va faire du foot aujourd’hui ! Dis-je à Vincent!

- Bonjour à tous, vous allez commencer par vous échauffer en me faisant un peu

d’endurance : c’est parti pour 5 minutes de course. Et interdiction de s’arrêter. Allez, top chrono! Et les rappeurs, vous m’enlevez ces lunettes de soleil pour courir!

Tout le monde le respecte ,Monsieur Deville. Il a 45 ans je crois, il est marié et a une petite fille de 7 ans qui s’appelle Camille et c’est le plus ancien prof du Campus, ça fait 14 ans qu’il vit à Taiwan et pour moi c’est le plus sympa de tous, peut-être parce que j’adore le sport…?

Bien entendu, les trois rigolos en profite pour faire leurs intéressants devant les filles en courant à toute vitesse ou en faisant des zigzags quand ils passent près d’elles.

Au troisième tour je remarque que mon lacet est défait, alors je m’arrête pour le refaire. Mais le prof me voit et me crie:

- Lucas, j’ai dit qu’il était interdit de s’arrêter, tu me feras deux tours de plus ! !

- Mais, M’sieur, c’est pas de ma faute, mon lacet s’est défait !?

- Je ne veux pas le savoir, 2 tours et c’est tout.

Ça alors, me dis-je, c’est trop injuste, c’est bien la première fois que je trouvais que Mr Deville avait été sévère avec moi.

Deux minutes plus tard, je vois Robert qui s’amuse à tirer les cheveux de Sophie, et comme le prof est occupé à installer le matériel, il ne voit pas ce qui se passe. Je vais donc le lui signaler, mais il me répond d’une voix forte:

- Tais-toi Lucas !Au lieu de rapporter, tu ferais mieux de courir comme les autres!!

Ça, c’est trop fort. Je vais donc retrouver Vincent pour lui dire que le prof a un comportement très agressif aujourd’hui. Mais il me répond juste qu’il s’est certainement levé du pied gauche ce matin.

- Oui, tu as sûrement raison Vincent, n’y pensons plus et allons jouer au foot !

Arrive donc le moment tant attendu de la partie de football. Je suis capitaine d’une équipe et Robert de l’autre. Tout se passe bien jusqu’au moment ou Zap, au lieu de taper dans la balle, me frappe dans le genou. Je me retrouve au sol et normalement l’arbitre, notre prof, aurait dû siffler une faute, mais il dit simplement :

- Allez, relève toi Lucas,il n’y a rien, debout!

Mais moi, j’ai vraiment mal et je préfère m’arrêter de jouer en continuant de penser que monsieur Deville est très bizarre, car d’habitude il s’inquiète toujours lorsqu’une personne tombe à terre. Je vais donc m’asseoir dans les tribunes et décide d’aller lui parler après le match.

8H55
C’est la fin du cour de sport, nous retournons au vestiaire et j’attends que tout le monde soit parti pour aller voir le professeur:

- Monsieur, puis-je vous parler?

- Oui Lucas qu’y a-t-il encore !?

- Et bien tout à l’heure, je trouve ça injuste car il y a vraiment eu faute et j’ai encore mal au genou!

- Je suis désolé Lucas mais je ne peux pas tout voir et j’ai la tête ailleurs en ce moment.

- Oui vous me paraissez un peu triste et nerveux!

- Euh…oui…c’est vrai…ça paraît un peu bizarre, mais depuis vendredi dernier, je ne me sens pas très bien et je crois que c’est parce que je ne retrouve plus un objet auquel je tenais beaucoup.

- Ah oui ! Peut être qu’on peut vous aider à le retrouver cet objet ? A quoi ressemble-t-il?

- Et bien, c’est une sorte de collier que ma femme m’avait offert pour mes 40 ans et qui vient d’Afrique. Bien sûr, il n’a aucune valeur mais je l’aimais bien et vendredi soir, en voulant le chercher dans mes affaires je ne l’ai pas retrouvé.

- Comme un porte-bonheur, un Gri-Gri !!

- Oui, c’est ça, tu en as un ?

- Oui, …euh…enfin non. Mais mon père doit m’en rapporter un la semaine prochaine !

- Eh bien j’espère qu’il te portera chance et que tu ne le perdras pas comme moi !

- Bon, excuse-moi Lucas mais il faut maintenant que j’aille faire cours, à plus tard.

- Oui à plus tard, et ne vous inquiétez pas, on va le retrouver votre Gri-Gri !

- Merci Lucas, ce serait formidable!

Au moment de sortir du vestiaire, j’aperçois Zip qui sort des toilettes et je me demande s’il a tout entendu de notre discussion et commence à me poser des questions sur la disparition du Gri-gri de Monsieur Deville.

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